Le site de Champenoux, en Lorraine, est l’un des cinq sites en France sur lesquels travaillent des agents de l’Institut national de la recherche agronomique. Installé dans l’immense forêt d’Amance, il s’est enrichi d’un nouveau bâtiment de laboratoires et de bureaux qui vient compléter le site existant.
Ces plateaux techniques de haut niveau accueillent des chercheurs français et étrangers qui collaborent dans l’étude de l’écologie et de la génomique forestière. De par son histoire et son positionnement géographique, le centre Inra de Nancy s’est toujours largement consacré à l’étude de la forêt et de ses produits (dont le bois est le plus significatif). Cinq cent personnes étudient les sujets allant du génome au territoire en passant par le fonctionnement des arbres et des écosystèmes ou encore par l’économie forestière ou la production de biomasse. Pour ces spécialistes du bois en France, le projet devait être exemplaire d’un point de vue environnemental avec un affichage « tout bois », afin de mettre en accord le fond et la forme.
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Sa façade Sud en courbe embrasse toute l’entrée du site et se présente comme un jeu de rubans de bois sur fond de paysage. La face Nord, lisse, répond aux bâtiments construits dans les années 60. Ces deux éléments dynamiques du projet se rejoignent par un atrium, véritable cœur du projet. Derrière son apparence légère, ce bâtiment cache une grande technicité imposée par l’exigence de son programme. Architectes et maître d’ouvrage ont travaillé dans un cercle vertueux pour optimiser ses performances et impliquer avec une grande pertinence toute la filière bois locale.
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L’atrium, entre centre nerveux et jardin intérieur
L’atrium est le centre nerveux du projet. Il forme une « ruche » nourrie par les co-vibilités entre les activités. Il est le lieu des échanges, des partages, des rencontres et des expositions de travaux. Cette image transforme l’idée que l’on se fait de la recherche. Il relie les deux bâtiments dans une ambiance agréable caractérisée par des jeux d’escaliers, de passerelles et de transparences.
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Pour accentuer le caractère à part de cet espace, les paysagistes de l’agence Itinéraire Bis ont conçu un jardin exotique avec une autre nature, décalée, étonnante, tropicalisée, foisonnante et colorée. Toutes les galeries de distributions, les escaliers et les ascenseurs, sont immergés dans ce paysage. Il est généreusement éclairé, arrosé avec les eaux pluviales récupérées, animé par un bassin, et planté en pleine terre. Les plantations sont organisées en trois strates: les herbacées au sol, les arbustes à hauteur d’homme, les grands arbres colonnaires qui traversent les étages.
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« Le principe était que les plantations illustrent toutes les strates de la forêt tropicale humide, à la fois en lien avec le sujet de certains chercheurs de l’Institut et en réponse aux conditions de température et d’hygrométrie de l’atrium. Chaque strate est caractérisée par une plante représentative (couvre sol : figuier nain rampant, arbuste : oiseau de paradis ; grimpante / liane : jasmin étoilé ; plante épiphyte : fougère corne de cerf ; arbre : palmier à queue de poisson ; plante aquatique : prêle géante). »
Pour les experts de nos forêts, c’est un milieu boisé insolite et dépaysant, compatible avec une chaleur maintenue constante toute l’année. L’atrium procure aux deux bandes Nord et Sud, occupées par des locaux peu épais, une double orientation avec les avantages connus en terme de vues, de ventilation et d’éclairage naturel. La grande lentille en polymère ETFE qui le couvre lui apporte une lumière naturelle uniforme et contrôlée, produisant un effet de ciel artificiel.
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Bâtiment bifacé
Le programme est réparti sur deux orientations. La face Nord du projet est une réponse aux bâtiments des années 60 existants sur le site : façade lisse, habillages en panneaux bakélisés et fenêtres en bandeaux horizontaux. Elle fait écho aux édifices implantés en vis à vis, avec lesquels elle est reliée par une coursive en bois. On y trouve la majeure partie des laboratoires, bénéficiant d’une lumière stable, sans surchauffe estivale, et gardant un lien visuel direct avec le reste du Campus.
La face Sud matérialise l’entrée du Campus. Elle qualifie le projet avec sa double peau en bois et son plan courbe. La majeure partie des bureaux y est logée, affichés sur la voie d’accès, équipés de protections solaires adaptées, et bénéficiant de vues vers le lointain.
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Les coursives extérieures, protégées par une claustra en bois, prolongent les espaces de travail en créant un jeu de rubans de bois et de tressage horizontal et vertical. Elles jouent le rôle d’ombrières, réglées pour équilibrer protections et apports solaires et conserver intimité et confidentialité nécessaires. La densité varie selon l’orientation. De l’Est à l’Ouest, la texture du premier plan se densifie et entraîne un effet cinétique de la façade.
Les garde-corps en maille inox, les sols en caillebotis métalliques apportent légèreté et transparence à cette double épaisseur, en multipliant les impressions de tissage. C’est une structure suspendue, indépendante afin d’éviter les ponts thermiques, construite sur une logique d’utilisation d’un seul gabarit de section de bois (4 cm x 12 cm), pour garder un aspect très fin.
Structure apparente
En dehors d’une zone technique au rez-de-chaussée du bâtiment Nord, l’ensemble du projet est en structure bois ce qui est inédit pour un programme de laboratoire avec de grandes exigences techniques (température, pollution, vibrations….). L’utilisation du bois est rendue systématique (façades, planchers et refends intérieurs). Au delà des arguments d’éco construction, que l’agence Tectoniques défend dans tous ses projets. ll fait écho au sujet des recherches menées dans ces laboratoires (génomique forestière).
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Le parti constructif consiste à utiliser du bois massif avec des petites portées et un rythme dense sur une trame de 1,20 m x 6 m. C’est un projet qui utilise un grand volume de bois, des bois locaux, peu transformés et choisis dans la forêt voisine. La construction en filière sèche, l’utilisation de trames structurelles courtes, la taille et le mode d’assemblage des “macro composants” préfabriqués, et un plan facile à développer en extension, sont autant de dispositions qui garantissent l’évolutivité de ce laboratoire, y compris à court terme. En effet, les plateaux sont rendus libres de structures et peuvent être cloisonnés, et modifiés au gré des besoins. Par ce procédé constructif très visible, on peut dire que ce projet est très représentatif du travail de l’agence Tectoniques. Un parallèle peut être fait, par exemple, avec l’Espace Nordique pour le Biathlon à Bessans (73).
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Expérimenter le bois en filière courte
Le projet fait la part belle au bois : 250 m3 de sapin pectiné et de sapin de Douglas ont été employés dans ce chantier, uniquement sous forme de bois massif. Il s’agit d’une illustration du potentiel de la filière forêt-bois régionale à répondre à des demandes pointues. En effet, le bois utilisé en structure a été récolté dans des forêts vosgiennes, dans lesquelles les arbres ont été sélectionnés sur pied pour leurs caractéristiques dimensionnelles et mécaniques. Le sciage a été réalisé à quelques kilomètres des parcelles, et la filière a fonctionné sur le modèle du contrat d’approvisionnement mis en place ces dernières années par l’Office national des forêts (ONF).
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Cela permet la valorisation du sapin des Vosges, alors même que les gros et très gros bois résineux qui caractérisent les forêts du massif posent des problèmes de débouchés. Du bois classé structure C24 (marqué CE), séché, raboté, de marque Sélection Vosges, a été utilisé. Des sciages hors cœur ont été sélectionnés, demandant pour leur réalisation un savoir-faire spécifique qui est le propre des scieries lorraines. La scierie Bastien, de Romoneix a mené à bien l’opération, à partir de grumes provenant de la forêt domaniale d’Ormont-Robache et du défilé de Straiture. Une coopération étroite s’est établie entre l’ONF et la scierie : la traçabilité des bois du bâtiment Inra est complète.
Equipements spécifiques
Un certain nombre de dispositions permettent d’obtenir une qualité environnementale exemplaire, associée à la certification NF HQE Bâtiments tertiaires. La première mesure concerne la performance de l’enveloppe : isolants laine de bois de forte épaisseur, triple vitrage (sauf pour les parties Sud). Un puits canadien, construit avec les précautions nécessaires sur un sol d’argiles gonflants, permet de disposer d’un air préchauffé ou rafraîchi. Une chaufferie bois expérimentale a été installée pour venir en complément de la chaudière gaz du site existant. Elle utilise le miscanthus, cultivé et exploité sur le site par l’INRA, en complément de plaquettes bois. Un hangar a été construit, dans le cadre du projet, pour son stockage.
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L‘atrium, coiffé d’une lentille en ETFE, constituée de 3 membranes, joue le rôle d’une cheminée de tirage. En hiver, le dispositif tempéré avec les apports solaires zénithaux et le chauffage par le sol. En été, des ouvrants automatisés permettent une ventilation naturelle des locaux. Un système de sorbonnes complète les dispositifs naturels pour répondre aux exigences des laboratoires. Il occupe un niveau technique en couronnement du bâtiment, désolidarisé sur plots et sur isolation. La récupération des eaux pluviales dans une cuve enterrée dessert les bassins du jardin intérieur, les toilettes et l’arrosage des plantes.
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- Maître d’œuvre : Tectoniques
- Maître d’ouvrage : INRA
- Localisation : Champenoux, 54, France
- BET Bois : Anglade Structures Bois
- BET Fluides : Sechaud et Bossuyt
- BET Environnement : Indiggo Environnement
- Économiste : Tectoniques
- OPC : ETICO
- Paysagiste : Intinéraire Bis
- Date de livraison : 2013
- SHON : 1 440 m²
- Budget : 5 500 000 € HT
- Photographe : Renaud Araud
Source : Tectoniques